22 mars 2006

[GREVE] Quand les deux partis bloquent...

Je délaisse pour le moment les comptes rendus d'Assemblée Générale (ma spécialité) pour revenir, à l'instar de Max, sur l'actualité de la mobilisation en France, et de l'affrontement de plus en plus poignant entre un Premier ministre intransigeant et une population croissante (car désormais, on ne peut plus parler uniquement d'un conflit entre le gouvernement et les étudiants, mais plutôt d'un conflit opposant l'ensemble de la société française à ses dirigeants).
Dans l'affaire du CPE, Dominique de Villepin (laissons-lui son nom, faut le plaindre un peu, ce n'est pas marrant d'avoir les deux tiers de l'opinion contre soi! second degré inside) campe ou louvoie sur ses positions. En effet, d'une soirée à une autre, on entend notre Premier ministre dire qu'il "qu'il était prêt à des discussions sur deux points du contrat première embauche" c'est à dire la période des deux ans d'essai et la non-justification du licenciement. Pourtant, pour lui, "Sur cette loi, il y a trois choses qui sont impossibles, leur a-t-il lancé, la première c'est le retrait [...], la deuxième c'est la suspension [...], la troisième, c'est la dénaturation du projet !". Autrement dit, face aux syndicats et aux nombreux manifestants qui réclament le retrait préalable du CPE pour pouvoir discuter, la situation se bloque.
Mais à ce jeu, qui est le plus perdant? Les étudiants ou le gouvernement? Les deux (mon capitaine!), en fait. Puisque d'un côté, on risque de voir des étudiants tourner casaque parce qu'ils sont excédés par les blocage de leurs universités (pour certains, cela fait plus d'un mois que c'est le cas), et donc le mouvement dépérirait de l'intérieur ; De l'autre côté, c'est le gouvernement qui se verrait taxé d'une franche impopularité. Le sondage CSA publié la semaine dernière (réalisé le 14 février) révèle que seulement 36% de la population se disent confiantes en son action "pour affronter efficacement les principaux problèmes qui se posent au pays". Ils étaient 47% un mois avant. Lourde chute donc dans les sondages, qui si la situation ne se modifie pas, risque de laisser des séquelles, bien regrettables pour les ambitions présidentielles d'un homme politique qui n'a jamais été élu.
Les seules concessions qu'il est disposé à accorder ne sont pas de son ressort, puisqu'il autorise les partenaires sociaux à réduire la période d'essai, mais pour cela, il faut que toutes les entreprises d'une même branche soient d'accord. Et concède du bout des lèvres que le licenciement pourrait être justifié (et encore, ce n'est même pas sûr). Toujours est-il que Dominique de Villepin entend résister contre vent et marées, alors que déjà dans sa majorité, les rats quittent le navire (second degré inside). Un énième remake du Titanic? En gros, les aménagements prévus se feraient "dans le cadre de la loi" ; belle manière de dire "débrouillez-vous, la loi est votée, c'est à vous de l'adapter", et souhaiter se débarrasser du cadeau qui fait "boum".

Un article de Libération est assez évocateur de cet entêtement digne de la pire mule sur la terre (pardon en passant à ce sympathique animal, dont l'entêtement est généralement justifié, à la différence de notre Premier bourricot) :
Villepin est en guerre et c'est sa majorité qui trinque. Hier soir, il a fait une nouvelle démonstration de son entêtement devant les parlementaires UMP convoqués pour «un pot amical» à Matignon.

[...]

«Tout le monde est sorti estomaqué devant tant de raideur, a raconté un des participants à la sortie. Mais peu osent l'ouvrir : c'est le bal des faux-culs.»
Pour que des parlementaires en viennent à dire cela, c'est qu'il y a un malaise grandissant au sein même de l'UMP. L'article se poursuit en ce sens :
A midi, il se rend devant les députés du groupe UMP à l'Assemblée. Peu de temps avant, la réunion du bureau du groupe a été le théâtre de toutes les craintes. Jean-Paul Anciaux (Saône-et-Loire) a évoqué 1995, le «droit dans ses bottes» de Juppé, la dissolution qui a suivi et la défaite aux législatives. Philippe Briand (Indre-et-Loire) a déploré «le manque d'humanité» du gouvernement et de son Premier ministre.

[...]

Dans les couloirs, un député sarkozyste se lamente : «La seule question qui vaille désormais est : quand Chirac va-t-il le lâcher ?» Claude Goasguen (Paris) reconnaît : «Il est difficile d'expliquer le CPE. Moi-même je n'y arrive pas.» Proche de Sarkozy, Eric Woerth s'interroge ingénument : «Le CPE n'est pas un outil indispensable pour lutter contre le chômage. Est-ce que tout cela en vaut bien la peine ?»
Révélateur, non? Beaucoup de ces parlementaires voient leur avenir attaché à celui de la forteresse H.M.S Villepin.
Et pendant ce temps, les étudiants, les salariés sont en train de se masser pour des manifestations de plus en plus importantes, de plus en plus suivies, à commencer par celle de jeudi. Puis par la grève prévue mardi (apparemment une journée). En lisant ces quelques citations plus haut, on se dit que les parois commencent peut être à se lézarder. A moins qu'un garde ne tourne sa veste et ouvre la porte...

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